Le Trompe-l’oeil [Notes de lecture]

L’Art du Trompe-l’œil, Omar Calabrese, Citadelles & Mazenod, 2010


Le Trompe-l’œil est l’unique genre pictural dont le nom fait référence à la relation au spectateur (et pas comme habituellement au contenu de l’œuvre ou à sa technique). La relation avec les yeux du « regardeur » est déterminante.

Se pose le problème du rôle de l’artiste :

La simulation de la réalité (que le but recherché soit une vraie crédibilité ou juste la fascination du spectateur) implique une disparition quasi-totale de l’auteur… Qui ne peut laisser voir ni l’effet de sa main, ni celui de son pinceau, ni apposer sa signature – sauf si elle est inséré dans l’espace tridimensionnel et participe à l’illusion (cartellino*).

D’où ce paradoxe:

Si le trompe-l’œil « appelle le spectateur », par son point de vue rapproché et l’envahissement de l’espace de perception,il abolit également la subjectivité, pour sembler une vision objective du monde.
Cette illusion de l’objectivité repousse l’artiste vers un statut d’artisan, puisque le critère principal de jugement devient l’habileté manuelle de l’artiste, au détriment de son expression personnelle ou de sa créativité.

Un exemple de cartellino*. Giovanni Bellini, La Vierge à l’Enfant (détail), vers 1480. Londres, National Gallery.

*Cartellino : feuille de papier, tablette ou cartouche de marbre figuré en trompe-l’œil dans un tableau et sur lequel est inscrite la signature du peintre et parfois la date de l’œuvre. [Source: Larousse.fr]

Giovanni Bellini, le Doge Loredan, 1501. Londres, National Gallery.

On peut parler au sujet du trompe-l’œil d’une quadruple spatialité :

1° surface bidimensionnelle (support)
2° profondeur de champ (perspective)
3° extension de l’espace du tableau vers le spectateur
4° épaisseur produite par la peinture (feuil)

Jean-Marie Faverjon, Autoportrait en trompe-l’œil, 1868. Paris, musée d’Orsay.

Le trompe-l’œil classique joue avec ces différents espaces :

Rebord, niche, seuil incluent le spectateur dans la représentation (esp. 3); mouche peinte (musca depicta) et cartouche ou étiquette (cartellino) déjouent les règles de la surface bidimensionnelle. Cadre peint incorporé dans l’image annule presque l’épaisseur (esp. 4).

La vision souvent plane et rapprochée tend à abolir la ligne d’horizon et à annuler la profondeur de la perspective (esp. 2).

Ecole Souabe, Portrait d’une femme de la famille Hofer (détail), 1470. Londres, National Gallery.

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